Après la longue mise en veilleuse par les Modernes de tout « discours sur les vertus », force est de constater un retour de la notion de courage dans les discours contemporains : non seulement dans le champ médiatique, prompt à ériger de nouveaux temples pour des héros d’un jour, mais plus encore dans un certain discours politique qui appelle les individus tantôt à la performance, tantôt à la responsabilisation de soi. Face à ce retour qui agit à la manière d’une injonction, cet essai veut se réapproprier la notion de courage par les chemins de son histoire philosophique, de manière à indiquer les présupposés et les conséquences de ce nouvel appel commun à l’héroïsme individuel.
Le courage est-il un acte héroïque, tel que mis en scène dans l’Iliade d’Homère, ou réside-t-il dans une patience discrète, valorisée par les chrétiens ? Doit-il être pensé comme modération, dans la lignée de la morale d’Aristote, ou comme excès politique à la façon machiavélienne ? S’agit-il d’une vertu individuelle, comme le suppose l’éthique grecque, ou d’une vertu collective et anonyme telle qu’une tradition républicaine plus romaine le suggère ? Est-il défini par l’action, comme chez Arendt, ou par la réflexion, comme chez Platon et Kant ? S’il est action, celle-ci doit-elle être pensée dans son caractère radicalement politique ou, au contraire, comme le réclame Dewey, dans son contexte social ? S’il est par contre réflexion, celle-ci n’est-elle pas alors d’abord celle du philosophe sur sa propre actualité, comme le suggère Foucault ?
Thomas Berns, Laurence Blesin, Gaëlle Jeanmart : Du courage. Une histoire philosophique
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