Serge Audier est maître de conférences en philosophie politique à l’Université Paris-Sorbonne. Il a notamment publié La pensée anti-68 : Essai sur les origines d’une restauration intellectuelle (2008).
Pour beaucoup, le néo-libéralisme constitue le phénomène majeur de notre temps. C’est lui qui donnerait la clé de la crise économique et financière, des nouvelles formes de management, ou encore de la « privatisation du monde ». Il est pourtant difficile de voir clair dans cette notion. Le néo-libéralisme, est-ce le « laisser-faire » ? Ou bien l’avènement d’un Etat fort au service de la concurrence ? S’agit-il d’un modèle hyper-individualiste et libertaire, ou bien d’un nouveau conservatisme normalisateur ?
Pour s’y retrouver, ce livre propose une généalogie internationale des idées néolibérales depuis les années 1930, à travers ces moments que furent le Colloque Walter Lippmann (1938) et la Société du Mont Pèlerin (1947). Il montre comment la crise du libéralisme, après le Krach de Wall Street, a entraîné des révisions et des réaffirmations doctrinales visant à sauver les idées libérales. Mais, loin de toute vision linéaire, il soutient aussi que la redéfinition du libéralisme a fait l’objet de conflits féroces entre ceux que l’on appellera les « néolibéraux ».
Sur cette base sont établies des distinctions historiques et conceptuelles entre des mouvements que l’on confond trop souvent : le conservatisme, le néo-conservatisme, le libertarisme et le néo-libéralisme. Revenant sur le travail des think tanks et des principaux théoriciens de ces mouvances, le livre montre aussi la présence de traditions nationales hétérogènes. Alors que la « droitisation » de l’Europe semble aujourd’hui en marche, une telle mise en perspective permet de mieux déchiffrer la crise de légitimité du capitalisme et les réponses politiques qui lui sont données.