L’année 1759 fut pour Diderot celle du désenchantement. L’Encyclopédie est interdite de publication. D’Alembert et Voltaire s’éloignent, Rousseau marque sa rupture avec lui. Son père meurt, sa vie conjugale devient difficile. Or, dans le tome VIII, connu plus tard des lecteurs, Diderot a rédigé l’article « jouissance », un éloge du rôle de la femme dans l’humanisation de l’espèce humaine. Et cette même année, la première lettre connue de Denis à Sophie Volland. Dans certaines de ces lettres apparaît l’expression « petit château » lieu magique où Denis, Sophie et sa soeur Uranie vivent dans cette jouissance physique et réfléchie qui doit les conduire au bonheur. Jouissance stérile cependant, nul enfant au château, jouissance imaginaire, « chimérique ». Pas tout à fait cependant. Cette année-là, il rédige son premier Salon. Le « petit château » rêvé pour séduire Sophie et Uranie n’aurait-il pas un commencement de réalité dans l’art ? Rien n’est moins sûr : le spectateur n’entre pas dans le tableau, il regarde. La vie passe, le désenchantement ne sera jamais surmonté, la jouissance toujours différée. Jusqu’à la mort de Sophie. D’ici-là il y aura des œuvres à écrire, et quelles œuvres !