« Matière et mémoire » s’ouvre sur une notion passablement énigmatique, celle d’image. Bergson y déclare d’emblée que ce qui nous apparaît lorsque nous ouvrons les yeux, c’est un ensemble d’images. Pourquoi ce terme s’impose-t-il ici à l’auteur, avec toutes les ambiguïtés qu’il pourrait recéler ? En quoi n’est-il pas réductible à une simple représentation dans l’esprit, comme c’était pourtant le cas dans la tradition philosophique jusqu’alors ? Quels en sont les enjeux profonds, susceptibles de relancer de part en part la philosophie bergsonienne en mettant en jeu le rapport de la conscience au monde ? Le but du présent travail est d’interroger en profondeur le sens et la portée de cette notion d’image, afin de mettre en lumière le renversement qu’elle établit dans la compréhension du dualisme bergsonien entre l’esprit et la matière. En épousant le fil conducteur de cette notion, il se demande quelle est la pertinence des critiques phénoménologiques adressées à Bergson, puis revient sur le statut de la mémoire, pour montrer en quoi, finalement, l’esprit humain et la matière doivent être repensés sur la base de l’image, mais une image déployée dans le temps, une image qui dure.
AUTEUR :
Agrégé et docteur, professeur de philosophie, Nicolas Cornibert a été allocataire à l’université de Poitiers. Auteur d’une thèse sur la notion de matière chez Bergson, il interroge son rapport à la notion d’image dans plusieurs articles, dont cet ouvrage se veut l’aboutissement concernant le statut de l’image dans « Matière et mémoire » (1896). Il a également publié en 2008, avec Jean-Christophe Goddard, un ouvrage sur l’Anti-Œdipe de Deleuze et Guattari.