« Les questions des spécialistes de la poésie ne sauraient être étrangères au public le plus large. J’ai voulu mettre face à face ceux qui ont fini par se tourner le dos : les poètes et leurs lecteurs professionnels, chagrins de la désaffection du grand public, le grand public, irrité de la difficulté des propositions de la poésie contemporaine. Je me suis demandé pourquoi l’art moderne avait réussi à imposer ses visions et pas la poésie. Il fallait donc s’expliquer, et expliquer ce que font les poètes.
En consacrant une étude à Michel Deguy, l’un des plus grands poètes français contemporains, je me suis donc proposé de procéder comme un critique d’art : me situer sur le plan même de la création d’un inventeur de formes.
Je me suis demandé ce qui faisait la singularité de Michel Deguy. J’ai trouvé que sa poésie et sa poétique rencontraient la question qui a dominé la pensée et l’existence depuis une bonne cinquantaine d’années : celle du rapport de l’identité et de la différence. Comme il est hautement révélateur que cette rencontre ait d’abord eu lieu en poésie, j’ai compris que la « question » du rapport poésie et philosophie était mal posée. »
MARTIN RUEFF
Auteur :
Poète, critique et traducteur, Martin Rueff enseigne à l’université de Paris VII-Denis Diderot. Il est corédacteur en chef de la revue Po&sie.
Il a publié notamment Icare crie dans un ciel de craie qui a obtenu le Prix international de la poésie francophone Ivan Goll et le Prix Henri Mondor de l’Académie française.