L’analyse systématique des mythes selon la méthode structurale, appliquée dans les quatre volumes, met en lumière des éléments révolutionnaires au XXème siècle : la façon dont les hommes produisent et associent des images, constitutives des mythes qui fondent leur vie commune, obéit à une logique propre, une rationalité latente. Que ces mythes soient « échangés », appropriés et/ou transformés par d’autres groupes que ceux qui les ont produits, ils conservent pourtant leur structure profonde, sont toujours reconnaissables, car les transformations subies obéissent à des règles : opposition, homologie, symétrie, etc. Les mythes fonctionnent ainsi sur le même mode que les variations sur un thème musical : la structure de base est toujours là. Dans e premier volume, Le cru et le cuit, Lévi-Strauss explore les mythes culinaires des tribus sud-américaines, puis fait émerger certaines propriétés générales de la pensée mythique, qui est aussi, en germe, une philosophie de la société et de l’esprit, comme il l’avance dans le tome 2, en insistant sur la capacité de la pensée mythique à s’abstraire des choses sensibles pour devenir « logique des formes » . Le tome 3 se concentre sur les codes de civilité et sur la moralité des tribus d’Amérique du Nord. Avec L’Homme nu, tome 4, Claude Lévi-Strauss conclut sa recherche, et sa pensée, dans le Nord-Est américain :
« (…)les mythes ne disent rien qui nous instruise sur l’ordre du monde, la nature du réel, l’origine de l’homme ou sa destinée. (…) En revanche, les mythes nous apprenent beaucoup sur les sociétés dont ils proviennent, (…) éclairent la raison d’être de croyances, de coutumes et d’institutions dont l’agencement paraissait incompréhensible de prime abord ; enfin et surtout, ils permettent de dégager certains modes d’opération de l’esprit humain, si constants au cours des siècles (…) qu’on peut les tenir pour fondamentaux et chercher à les retrouver dans d’autres sociétés et dans d’autres domaines de la vie mentale où on ne soupçonnait pas qu’ils intervinssent, et dont, à son tour, la nature se trouvera éclairée ».