Les éditions Vrin viennent de publier la traduction française du dernier ouvrage de Kurt Flasch consacré à Maître Eckhart1, ouvrage2 dans lequel l’illustre historien de la philosophie médiévale défend des positions sinon neuves, à tout le moins nettement nuancées au regard de certaines de ses productions antérieures. Le lecteur français pouvait d’ailleurs déjà se faire une idée de celles-ci à partir de deux ouvrages du même auteur, une magnifique Introduction à la philosophie médiévale3 ainsi qu’une restitution de la pensée du maître thuringien au regard de la pensée arabophone, à travers les conférences Pierre Abélard4
Au regard de ses anciennes études, Kurt Flasch semble avoir légèrement évolué ; il avait en effet, notamment dans l’article contenu dans L’introduction à la philosophie médiévale, relativisé l’hétérodoxie de Maître Eckhart et exposé les motifs parallèles à ceux de la rectitude théologique qui auraient entraîné sa condamnation ; ainsi n’hésitait-il pas à convoquer des motivations d’ordre social pour comprendre cette dernière. « Présentées à une nouvelle classe sociale et dans une langue nouvelle, ses idées étaient une provocation : la « noblesse » n’était plus pour l’homme une affaire de naissance, mais elle trouvait son origine dans l’activité de la volonté et de l’intelligence. »5 Il y avait là très clairement la volonté de trouver d’autres motifs que ceux de la seule question théologique, insensiblement présentée comme un alibi, afin d’expliquer la condamnation dont pâtit l’auteur du Livre de la consolation divine. Dans ce dernier ouvrage, Kurt Flasch abandonne les motivations parallèles et affronte comme telle la question de l’orthodoxie, reconnaissant avec force argumentation qu’elle était en effet douteuse dans l’œuvre eckhartienne ; Flasch semble même vouloir en finir avec toutes les entreprises plus ou moins heureuses de relativisation des écarts du Maître thuringien invoquant la fameuse « hardiesse » comme s’il ne s’agissait que d’une question de degré et non de nature dans l’ordre de l’écart.
A : Mystique ou philosophie ?
Le premier élément qui frappe à la lecture de cet ouvrage tient à la polémique entretenue autour de la notion de mystique ; Maître Eckhart doit-il être pensé comme un auteur mystique ou comme un philosophe à part entière ? Il existe à ce sujet bon nombre de lectures, mais il nous semble que Kurt Flasch, fidèle en cela à ce qui a toujours été sa ligne de conduite, en privilégie nettement la dimension philosophique. « Le projet d’Eckhart, écrivait-il déjà dans l’Introduction à la philosophie médiévale est d’unifier théologie et philosophie, mais de le faire à partir de la philosophie. »6 Avec ce nouvel ouvrage, il fait plus que confirmer une telle orientation, il en démontre la définitive pertinence, et tel n’est pas le moindre des mérites de ce grand livre.
Pour ce faire, Flasch est toutefois amené à affronter une question délicate, qui n’est autre que celle du rapport entre philosophie et christianisme, dans la mesure où Maître Eckhart, quand même serait-il pensé comme un philosophe, demeure d’abord un dominicain. Il va donc falloir à Kurt Flasch mener une sorte d’épokhè méthodologique, et mettre la notion de mystique de côté pour mieux comprendre comment l’on peut être philosophe – donc chercher la vérité – et chrétien – donc avoir déjà trouvé le lieu de la vérité. La réponse de Kurt Flasch réside dans la notion de « philosophie du christianisme » – et non de « philosophie chrétienne ». « De manière exploratoire, écrit Flasch, je demande donc une mise entre parenthèses du concept de mystique, pour tenter de lire Eckhart comme philosophe du christianisme. »7 Que signifie dans ces conditions défendre une philosophie du christianisme ? Il s’agit d’un « traitement strict et méthodique des contenus de la foi chrétienne à la lumière de la pure raison. »8 Il s’agit donc non pas de renoncer à la foi au profit de la raison mais bien plutôt de parvenir par la raison à des énoncés que délivre la croyance chrétienne ; ou plus précisément encore : « par une procédure qu’il tient pour « purement rationnelle », un penseur s’efforce de démontrer des thèses qui figurent dans son monde comme des contenus essentiels de la pensée chrétienne. »9
On le voit, la position de Flasch est tout à la fois habile et efficiente : habile parce qu’elle ne présuppose pas l’hétérodoxie d’Eckhart et ne commet donc aucune pétition de principe en parvenant, à la fin, à démontrer les failles de son orthodoxie ; efficiente car, nantie de cet outil conceptuel, elle va être en mesure de contrer les réductions de la pensée eckhartienne à une mystique par définition non médiatisée par la raison. En d’autres termes, une grande partie de l’intérêt de cet ouvrage réside dans le fait qu’il montre que l’on peut rationnellement discourir de la pensée eckhartienne, et que l’on n’est pas condamné à ne l’évoquer que sous des formules métaphorico-mystiques. C’est du reste une des raisons pour lesquelles Flasch insistera longuement sur l’importance de l’intellect qui, à partir des années 1300, se présentera comme la condition et fondation de l’unité, dispensant donc de faire appel à quelque intuition mystique pour rendre compte de l’hénologie eckhartienne. En somme, tout dans ce livre incite à se dispenser du détour mystique quant à l’intelligibilité de l’œuvre entière du Maître thuringien, et cela est salutaire.
B : Une méthode spécifique : l’auto-interprétation
Une fois exposé l’esprit dans lequel s’élabore l’ouvrage de Flasch, nous aimerions aborder la méthode retenue ; c’est assurément à l’auto-interprétation que fait appel l’historien qui dresse une impressionnante liste de textes dans lesquels le Maître dominicain commente ses propres textes, écrits ou oraux. Et ce procédé culminera bien évidemment lorsqu’il sera question du procès.
Que révèle cette auto-interprétation ? Sans aucun doute deux choses ; d’une part, ce que Flasch appelle « la source de la pensée d’Eckhart »10 qu’il identifie dans l’idée que le penser offre une voie d’accès préalable à tous les textes révélés11. D’autre part, l’auto-interprétation révèle que l’intellect est une percée dans l’être pur, et que le Verbe naît en lui. « Par l’intellect l’homme est image de la divinité. Ainsi, il correspond parfaitement à l’origine, qui est le verbe. Dans la mesure où il est image (Bild), il n’entretient aucune différence par rapport à son archétype (Urbild). L’intellect peur séparer le soleil de son rayonnement lumineux, le feu de la chaleur, mais il ne découvre aucune distinction entre l’archétype et l’image. »12 La conjugaison de la méthode et de la philosophie du christianisme permet ainsi de découvrir tout aussi bien la rationalité du propos eckhartien que la conscience qu’a le Maître de ne précisément faire appel qu’à la raison pour établir les vérités de la foi. A cet égard, les autorités traditionnelles se trouvent nécessairement réévaluées à la baisse, à tout le moins dans la conscience qu’Eckhart peut prendre de sa propre pensée : « Eckhart se fixe donc un double but. Il prévoit d’atteindre ces deux fins au moyen d’argumentations philosophiques. Il ne recherche pas un point d’ancrage antérieur à la réception d’Aristote et des commentaires d’Averroès. Il veut d’abord démontrer philosophiquement les plus hautes vérités de l’Ecriture, l’être divin, sa Trinité, la création du monde et l’incarnation ; il entend ensuite montrer que la Bible contient tous les principes de la connaissance de la nature. »13 Pour le dire autrement, le commentaire fondé sur l’autorité perd de sa force au profit d’une confiance accrue accordée à la raison ; Kurt Flasch retrouve du reste, avec cette idée d’une confiance accordée à la raison, les traces d’un ancien ouvrage par lui publié, dans lequel il identifiait chez Dietrich des éléments préfigurant les Lumières en substituant la réflexion rationnelle à l’adhésion fiduciaire au discours traditionnel14.
C : Un testament herméneutique
Au-delà de la méthode retenue et de la philosophie du christianisme, Flasch fait part au lecteur de ce qui semble être son testament herméneutique ; cette étude consacrée à Maître Eckhart est en effet émaillée de réflexions profondes dont l’on mesure la lente sédimentation immanente, consacrées à la façon dont doit être menée une histoire de la philosophie, et c’est là un élément tout aussi précieux que l’élucidation de la pensée eckhartienne comme telle qui se trouve soumis au lecteur. « Les textes philosophiques et poétiques, analyse K. Flasch, exigent de leur lecteur deux attitudes, pour ainsi dire. Lis-moi, disent-ils, comme si j’étais tombé du ciel à l’instant, sans préhistoire, sans réception. Reçois-moi comme si j’étais écrit pour toi seul ; la seule chose qui importe est que tu reconnaisses que je te rencontre, que j’explique ta vie et narre ce qui lui appartient. (…). Cependant, en même temps le texte dit : analyse-moi comme un produit de temps révolus, car je suis conditionné par toutes les modalités historiques, sociales, intellectuelles et psychologiques possibles. Dans une seconde phase, traite-moi comme un produit qui vient de l’histoire. »15 En d’autres termes, Flasch propose de mettre fin à l’opposition sans doute stérile entre les lectures immanentes et analytiques des textes et les lectures herméneutiques, cherchant à sans cesse relier ce qui est dit à un contexte historique et philologique qui en vient à faire perdre la spécificité du texte lui-même. Lire le texte pour lui-même n’est pas incompatible, avance l’illustre historien, avec la nécessité de le situer. Cette position équilibrée n’est pourtant pas une synthèse molle ni un refus de trancher : elle constitue bien au contraire un parti-pris en faveur d’une interaction entre ce qui est dit dans le texte et ce qui apporte un surcroît de sens à partir de ce qui est extérieur au texte16.
Cette interaction peut prendre des formes tout à fait remarquables, notamment dans le cadre de l’engendrement du Fils. Flasch s’appuie d’une part sur l’histoire de l’anthropologie philosophique. Rappelant que celle-ci s’est intellectualisée depuis la réception d’Aristote, l’auteur synthétise la formation du connu : dans toute faculté cognitive se constitue une image de ce qui est connu. Voilà le contexte. Mais cela n’exclut pas, au contraire, de produire une lecture analytique du propos eckhartien consacré à la question de l’engendrement du Fils : chez Eckhart, le Père engendre le Fils comme le connaissant produit une image cognitive. Ainsi pouvons-nous éclairer à partir du texte lui-même le procès d’engendrement du Fils tout en brossant le cadre historique dans lequel s’élabore une telle conception de la Filiation.
L’épilogue est d’ailleurs consacré à la question contextuelle puisque Kurt Flasch s’attache à montrer combien la pensée eckhartienne s’est élaborée sur un terrain déjà labouré par Dietrich de Freiberg. De Dietrich proviennent en effet les théories de l’intellect, de l’être de connaissance, de l’accident et de l’analogie, qui divergent des conceptions scolastiques standards. « Dietrich peut-il être considéré comme l’instigateur de la pensée eckhartienne ? La réponse est oui, il l’était sans aucun doute. »17 Flasch liste alors une série d’influences, qu’il identifie en grande partie dans le De origine, influences que l’on peut ainsi hiérarchiser : 1) l’élimination de la causalité efficiente et finale en métaphysique ; 2) l’analyse caractéristique de l’accident ; 3) l’interprétation non-thomiste de l’analogie ; 4) La théorie du temps et de la relation ; 5) L’argument de l’impossibilité de la nature pour distinguer entre chose singulière et idée. De là cette conclusion de Kurt Flasch : sans doute « Dietrich est l’incitateur d’Eckhart. Durant plusieurs années, les deux hommes se sont fréquentés et ont assurément discuté. Rien n’est plus naturel que l’influence d’élèves exercée sur leur maître. Mais cela n’abolit pas la priorité temporelle et argumentative. »18
D : Eckhart et Thomas : l’écart manifeste
A l’issue de la lecture de cet ouvrage, c’est un Maître Eckhart à la fois profondément éloigné de l’enseignement parisien et en même temps parfaitement convaincu de servir les vérités de la foi qui apparaît. Kurt Flasch s’emploie donc à montrer tout ce qui sépare le Maître thuringien de Saint Thomas19 avec lequel se creuse une grande distance. Celle-ci s’exprime d’abord dans la connaissance, puisque tout être, chez Maître Eckhart, dérive de l’intellect. Nous sommes très loin de Thomas pour qui la connaissance de l’ange n’était pas identique à son être alors qu’Eckhart enseigne que la connaissance de l’ange n’est pas un être. « Cependant, par son contenu l’argumentation d’Eckhart concerne exclusivement notre intellect et notre perception. Notre intellect n’est rien et notre connaissance intellectuelle n’est pas un être. »20 L’intellect en tant que tel et la sensation en tant que telle ne sont ici ni maintenant, dans la mesure où ils ne sont rien ; « ce n’est qu’en tant que puissances de l’âme qu’ils sont quelque chose. »21
Mais c’est évidemment sur l’analogie que la différence est la plus accusée. Là où Thomas défend l’idée d’un acte d’être interne aux créatures, Eckhart s’y oppose très fermement, notamment à travers la doctrine de la création continuée : « les créatures n’ont d’elles-mêmes ni être ni unité, pas plus que l’urine ne possède la santé. »22 Cela tient au fait que Dieu est l’être, et que la créature ne pouvant être Dieu, elle ne peut avoir d’acte d’être. De là cet usage très spécifique qu’Eckhart propose de l’analogie : « comme Aristote et Thomas il utilise l’exemple de l’urine et de la santé, mais il souligne qu’il n’y a absolument rien de la santé dans l’urine. Il affirme la non-autonomie de l’accident plus fortement que Thomas, à l’égal d’Aristote, d’Averroès et de Dietrich. »23 Enfin, la divergence porte également sur la Trinité. Le maître thuringien s’écarte de la doctrine thomiste de la Trinité sur 5 points : 1) il conteste toute distinction en l’Un ; 2) il l’interprète comme retour de l’intellect à lui-même, comme réflexion (sermon 9) ; 3) il démontre la Trinité à l’aide d’arguments philosophiques (commentaire de Jean) ; 4) tout ce qui a été écrit sur la Trinité est présenté comme faux (sermon 4) ; 5) Il conteste la notion de nombre appliquée à l’unité divine.
Notons que nous avons ici une application pure de la méthode de Kurt Flasch qui, tout à la fois, envisage le contexte parisien au sein duquel évolue Eckhart, refusant par là une lecture exclusivement immanente et en même temps cerne le propos précis du Maître pour mieux en évaluer la singularité. Ainsi pouvons-nous élargir cette analyse que Flasch consacre à la filiation divine à l’ensemble du geste eckhartien : Eckhart se positionnait contre le thomisme qui régnait au sein de l’ordre, mais aussi contre un consensus scolastique. »24
Conclusion : un tableau d’ensemble réussi
Cet ouvrage aborde à nouveaux frais l’œuvre eckhartien, et propose une approche précise, rationnelle, convaincante et ferme. C’est du reste le projet que se proposait de mener Flasch dans la préface : « en écrivant ce livre je n’ai pas regardé vers le passé, pas même vers certains de mes précédents travaux sur Eckhart. J’ai relu tous les textes d’Eckhart à nouveaux frais et je présente un projet neuf : non pas une étude de détail, mais un essai de tableau d’ensemble. »25 Ce tableau d’ensemble est une réussite indiscutable, et apporte quelques nuances aux travaux antérieurs, notamment par rapport à Meister Eckhart. Die Geburt der „Deutschen Mystik“ aus dem Geist der arabischen Philosophie26 ; nous ne pouvons donc que nous réjouir amplement de cette traduction française du Meister Eckhart. Philosoph des Christentums27 qui défendait cette thèse d’un Maître Eckhart présentant sous forme rationnelles les énoncés de la foi.
La seule réserve que l’on pourrait exprimer à l’égard de ce grand livre tient à la collection où il est édité : en effet, le livre constitue en réalité une discussion permanente avec de nombreux commentateurs, et charrie l’ensemble des questions herméneutiques classiques concernant Maître Eckhart ; hors, loin d’être publié dans une collection pour spécialistes, il est présenté comme une introduction générale à l’œuvre du Maître thuringien ; à cet égard, il n’est pas certain que celui qui n’a jamais lu Eckhart ni ses commentateurs ne saisisse la portée de tous les débats autour desquels Flasch s’arrête longuement, si bien que l’on peut se demander si le public auquel s’adresse la collection retenue est le bon. Cette réserve mise de côté, redisons ici combien importante dans les études eckhartiennes nous paraît être cette publication, et combien le plaisir qu’éprouve Flasch à parler d’Eckhart est communicatif ; il semble en effet que l’illustre historien évoque le Maître thuringien avec une affection réelle et que, tout en conservant une approche rationnelle de son œuvre, il en subisse non sans plaisir les effets grisants de la séduction.
- cf. Kurt Flasch, Meister Eckhart, Verlag C.H. Beck oHG, München 2010
- Kurt Flasch, Maître Eckhart, traduction Catherine König-Pralong, Vrin, 2011
- Kurt Flasch, Introduction à la philosophie médiévale, traduction Imbach, Putallaz, Cerf, 2011²
- Kurt Flasch, D’Averroès à Maître Eckhart. Les sources « arabes » de la mystique allemande, Vrin, 2008
- Flasch, Introduction…, édition Champs Flammarion, p. 204
- Flasch, Introduction…, p. 196
- Kurt Flasch, Maître Eckhart, p. 29
- Ibid., p. 30
- Ibid., p. 31
- Ibid., p. 54
- Cf. Sermon allemand 53
- Ibid., p. 55
- Ibid., p. 57
- cf. Kurt Flasch, Aufklärung im Mittelalter, Dieterich’sche Verlagsbuchhandlung, Mainz 1989
- Ibid., p. 63
- Signalons que Kurt Flasch a toujours accompagné, comme Guéroult, son œuvre de commentateur d’une réflexion sur la méthodologie historique et sur la notion même d’histoire de la philosophie. Nous ne pouvons sur ce point que renvoyer le lecteur aux deux volumes de Philosophie hat Geschichte, Band 1 et 2, Vittorio Klostermann, 2003 et 2006
- Ibid., p. 317
- Ibid., p. 321
- Sur cette question, comme pour celle de la mystique et de l’hétérodoxie, Kurt Flasch rejoint les analyses d’Hervé Pasqua développées dans Maître Eckhart. Le procès de l’Un, Cerf, 2006
- Ibid., p. 119
- Ibid., p. 119
- Ibid., p. 133
- [Ibid., p. 281
- Ibid., p. 279
- Ibid., p. 10
- cf. Kurt Flasch,Meister Eckhart. Die Geburt der „Deutschen Mystik“ aus dem Geist der arabischen Philosophie, C.H. Beck, München 2006
- cf. Kurt Flasch, Meister Eckhart. Philosoph des Christentums, C.H. Beck, München 2010