Si l’on connaît l’importance du nombre dans la philosophie de Platon, on connaît moins bien la réflexion qu’il mène sur les nombres irrationnels et donc sur la possibilité de penser un univers en dehors de la rationalité. C’est pourtant la tâche que s’était donné Imre Toth dans un travail de longue haleine interrompu brutalement en mai 2010, et qui a des implications philosophiques inouïes, en ce qu’il remet en question bon nombre de nos à priori logiques et ontologiques concernant « ce qui est » et « ce qui n’est pas ». Achevé le 8 mai 2010, ce manuscrit nous est parvenu par courrier électronique, 48 heures avant la disparition de l’auteur, avec la mention : « il n’y a aucune urgence ».
Imre Toth était un mathématicien de renommée internationale, qui a enseigné dans de nombreuses universités européennes et américaines. Sa disparition en 2010 a suscité un vif émoi dans la communauté scientifique et plusieurs hommages lui ont été rendus en France et en Italie, où son œuvre est plus largement publiée. De son livre Liberté et vérité, paru à l’éclat en 2009, Jean-Paul Thomas (Le Monde) écrivait : « le livre de Toth est extrêmement séduisant, croisant la polémique politique la plus vive avec l’initiation limpide aux problèmes fondamentaux de la philosophie des mathématiques ».