Il faut remettre La pensée et le mouvant dans un triple mouvement. C’est d’abord une tension critique : la pensée humaine, selon Bergson, manque le mouvement qui est la réalité même des choses. Mais c’est aussi un effort, toujours repris : inventer, avec une rigueur inégalée, les concepts, les méthodes pour dépasser cet obstacle, accéder à cette réalité. C’est donc enfin le sommet d’une œuvre, dernier livre publié par son auteur, en 1934, deuxième recueil de ses essais essentiels, dont chacun a fait époque mais c’est aussi son intuition la plus originale c’est surtout, en acte, la preuve que le mouvement n’est pas seulement l’objet, mais la nature même d’une pensée, qui n’accède au réel qu’en étant elle-même, dans le monde et dans l’histoire, une réalité.
La première édition critique des œuvres de Bergson, dans laquelle s’inscrit le présent volume, répond à un double principe : offrir d’abord le texte intégral du livre tel que l’a publié Bergson, dans sa pagination de référence inchangée le compléter ensuite par un dossier comportant des notes historiques et philosophiques ainsi que les variantes éventuelles du texte, une table analytique de l’ouvrage, une série originale d’index, une anthologie des « lectures » majeures et une bibliographie commentée.