Certains temps sont plus pro¬pices que d’autres à des reconfi¬gurations idéologiques : cela vaut particulièrement pour les temps de crise. Or, il y a une crise aujourd’hui dont l’un des noms en circulation est, à tort ou à raison, « le libéralisme ». Mais il n’est pas certain que ce temps de la crise soit le plus propice à l’examen de « la pensée libérale ». En rendant les enjeux politiques plus aigus, les crises en simplifient les termes. Pour remplir leurs fonctions politiques, les idéologies politiques doivent présenter aux groupes sociaux auxquels elles s’adressent des énoncés suf¬fisamment vagues pour être inclusifs, suffisamment simples pour être accrédités, suffisamment délimités pour apparaître comme exclusifs, suffisam¬ment fixés pour apparaître comme univoques. À cela, la dimension de la crise ajoute peut-être un changement de cartographie, au plan descriptif, et un changement de stratégie argumentative, au plan normatif. C’est ce qui conduit par exemple le « libéralisme » à entrer sur le terrain du « socialisme » par la porte du concept d’égalité. Décrire ces transformations et ces déformations en les rapportant à l’axe de leur histoire, situer ces descriptions sur l’axe philosophique des controverses normatives, c’est ce qui revient à la théorie politique et en l’occurrence ici à la présente étude : La Pensée libérale. Histoire et controverses.
Gilles Kervorkian (coord.) : La pensée libérale. Histoire et controverses
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