Et si la mystique, souvent considérée comme une expérience de l’inconnaissable, obéissait, au contraire, aux normes communes de toute expérience ?
C’est la thèse que développe Frédéric Nef : appliquer à la mystique les normes de la connaissance en ce qui concerne d’abord la justification des croyances et le rôle premier de la perception pour affirmer l’existence d’une « connaissance mystique » et cerner son objet, l’essence ou la bienveillance de Dieu. Cette lecture va donc à contre-courant de la manière actuelle de concevoir la mystique – un territoire ineffable pour les enfants perdus –, en rapatriant la connaissance mystique sous l’autorité rectrice d’une épistémologie générale, et en favorisant des comparaisons fructueuses avec la physique et la métaphysique. Dans son argumentation exigeante l’auteur prend en compte tant les mouvements de la théologie mystique que des phénomènes mystiques (les stigmates, les sens spirituels), et des techniques spirituelles (l’aspiration ou la suspension). En ce sens ce livre est également la cartographie de tout un monde dont il cerne l’émergence splendide,
puis le tragique retrait. Un maître-ouvrage, l’oeuvre d’une vie.
Frédéric Nef est directeur d’études à l’EHESS. Auteur de nombreux articles et livres en sémantique, histoire de la philosophie, théologie philosophique, il a contribué à faire connaître la métaphysique à un large public, notamment grâce à son livre Qu’est-ce que la métaphysique ? (Gallimard, 2004). Il est l’auteur d’une trilogie fameuse : L’objet quelconque, Les propriétés des choses, L’anti-Hume (Vrin, 1999, 2006, 2017).