Le philosophe est-il capable d’affronter intellectuellement les situations que subissent ceux dont la vie est confrontée à la plus extrême fragilité ? Par-delà l’émotion et l’indignation, peut-on forger des outils philosophiques qui puissent nous aider à agir ? A quoi servirait donc de philosopher, avec des concepts, des données et des images, en Haïti ou au sud du Sahara ? A dégager les logiques qui, entre raison et déraison, dictent les pires radicalisations de la souffrance et de l’humiliation dont le monde humain reste capable. A établir, au-delà de généralités convenues, d’indispensables priorités face aux exigences de la survie ou à celles d’une vie décente pour les femmes, les enfants, pour les plus vulnérables à la violence et au risque.
« Comme être humain et comme philosophe, j’ai postulé en décidant d’écrire ce livre que la philosophie, à condition de sortir de son enfermement dans les concepts et les purs principes, peut être humaine – je veux dire : prendre en charge, comme une pensée et comme un discours qui a ses spécificités, les questions que soulève le type de vacillement entre l’humain et l’inhumain qui m’apparaît constitutif de l’extrême. »
Alain Renaut est professeur de philosophie politique et d’éthique à l’Université de Paris-Sorbonne et à l’Institut d’Etudes politiques de Paris. Il est également directeur du Centre International de Philosophie Politique Appliquée (CIPPA). Il est l’auteur de très nombreux ouvrages concernant des questions éthiques et politiques fondamentales et ne cesse de s’interroger sur les conditions d’un monde juste. Ses projets en cours portent sur une approche philosophique et cinématographique des génocides et massacres de masse. Il s’interroge aussi sur de possibles prochaines guerres qui seraient de religion ou de conviction.