Peut-être n’a-t-on plus peur des marxistes, mais on a encore peur de certains non-marxistes qui n’ont pas renoncé à l’héritage de Marx.
Diego-Fusaro-NB
Diego Fusaro (Turin, 1983) enseigne l’histoire de la philosophie à l’Institut des Hautes Etudes Stratégiques et Politiques (IASSP) de Milan. Elève de Costanzo Preve et de Gianni Vattimo, sa philosophie interroge les structures de la temporalité historique à la lumière de la pensée de Fichte, Hegel et Marx. Il a publié de nombreux ouvrages, dont Essere senza tempo. Accelerazione della storia e della vita (Bompiani, 2010), Minima mercatalia. Filosofa e capitalismo (Bompiani, 2012), Pensare altrimenti (Einaudi, Torino 2016).
L’aspiration au communisme, aujourd’hui, dans le monde post-1989, ne semble pouvoir exister qu’en tant que réminiscence d’un monde alternatif auquel on est resté sentimentalement attaché : comme s’il s’agissait d’une utopie prématurément abandonnée ; une utopie vers laquelle, en ces moments de crise, l’on pense se tourner. Toutefois, évoquer le «spectre» qui, à l’époque de Marx, rôdait déjà autour de l’Europe et qui aujourd’hui est devenu encore plus fantasmatique ne signife pas seulement prendre acte de la faillite – évidente sur toute la ligne – des prétendues vertus salvatrices du capitalisme et de l’économie du «libre marché », système que l’idéologie contemporaine a érigé en paradigme unique de notre société.
«Marx avait raison: la lutte des classes existe, mais ce sont les dominants qui sont en train de la gagner, sans rencontrer de résistance de la part des offensés de la planète, réduits à subir en silence, dans une condition de passivité. Tant que le capitalisme, la lutte des classes, l’aliénation et l’exploitation seront là, Marx aussi sera vivant et il sera même le point de repère incontournable de toutes les luttes de libération. Sur ce point, je partage la lecture de Diego Fusaro: Marx à lui tout seul est aujourd’hui insufsant, mais, sans Marx, il est impossible de comprendre, de critiquer et, le cas échéant, de dépasser les contradictions du capitalisme actuellement triomphant».