Comment rendre compte du mouvement? Phénoménologiquement, le mouvement peut être considéré comme trait essentiel de toute manifestation. Là où un phénomène apparaît, un mouvement sous-jacent de sa venue à la présence se produit, et cette loi phénoménologique est à la fois universelle et nécessaire. Il s’agit, dans la langue de Husserl, qui emprunte lui-même à la langue de Kant, d’une loi synthétique a priori (d’une liaison entre le phénomène et ses conditions dynamiques, qui s’applique à toute expérience phénoménale possible) ou d’un a priori matériel (puisque cet a priori livre un contenu, une matière, qui n’est pas déductible de la simple forme subjective de l’expérience, mais suppose la rencontre effective de la conscience avec le donné pour en saisir ses structures propres). Le mouvement, compris comme une détermination ontologique qui préside à l’entrée en présence et à la constitution ontogénétique de tous les étants individuels (les phénomènes), est l’a priori matériel le plus fondamental que la phénoménologie soit susceptible de découvrir. Nous réfléchirons notamment ici à quelques implications intéressantes de cette thèse, en particulier à son utilité pour la science physique qui a le plus grand mal, en raison de son naturalisme réductionniste ambiant, à reconnaître l’existence d’individus de plein droit.