Après la maxime phénoménologique « Aller aux choses mêmes », il importait sans doute de faire droit à l’impulsion herméneutique : celle qui (nous) commande de comprendre les œuvres qui parlent des choses mêmes. Après ce qui donne à penser (Kant, Ricœur), ce qui force à penser (Deleuze) ou ce qui appelle à penser (Heidegger), un quatrième motif est à interroger : ce qui porte la pensée, au sens de ce qui la conduit jusqu’à nous. Nous pouvons bien rêver d’une immédiate présence aux choses, nous savons aussi, et depuis le commencement grec de la philosophie, que long est le chemin vers le simple, le proche ou le natal. Ce chemin est celui de l’interprétation, celui qui reconduit au-devant des phénomènes. Comment voir ce qui se donne ou entendre ce qui nous appelle ? Comment retrouver le chemin des plus hautes questions, celles que nous disons « métaphysiques » ? Nous ne le ferons pas seuls, sans une histoire qui nous précède, sans des œuvres qui ouvrent le chemin, sans des propédeutes voire des presbytres pour initier à cette tâche. Jean Greisch fut et demeure l’homme d’un tel programme. Ces actes d’un colloque de Cerisy, tenu en 2015, rendent un hommage appuyé à sa culture, à ses travaux sur la métaphysique, la philosophie de la religion, la phénoménologie et sa greffe herméneutique entendue stricto sensu, à ses engagements, bref à son humanisme de l’homme toujours à naître.
Stefano Bancalari : Jean Greisch : Les trois âges de la raison
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