Ont contribué à ce volume : E. Danblon, V. Ferry, F. Macagno, M. Meyer, F. Paglieri, S. Rubinelli, C. W. Tindale, D. Walton
Aristote accomplira une véritable révolution, en redonnant à la dialectique son rôle argumentatif de questions et de réponses, s’obligeant à trouver une autre logique à la science, une logique qui deviendra « la » logique, celle du syllogisme, qu’on utilise toujours. La dialectique cesse donc d’être scientifique et la science va alors se constituer en une analytique propre, avec ses déductions spécifiques. Il reste alors à rendre compte de la production de réponses qui ne sont ni vraies nécessairement, c’est-à-dire scientifiquement, ni vraies par élimination dialectique des contraires, mais qui le sont vraisemblablement, et qui sont donc convaincantes, sans être vraies nécessairement. Mais faute de questionner le questionnement, Aristote a du mal à juxtaposer toutes ces disciplines, et notamment, à intégrer la dialectique dans la rhétorique (ou à faire l’inverse, la rhétorique dans la dialectique). La dialectique relève bien d’un champ propre, celui de la contestation d’opinions qui semblent évidentes à certains ou à beaucoup, mais pour arriver à l’argument qui met l’adversaire en déroute, il faut quand même encore pouvoir délimiter des points d’ancrage communs, à partir desquels bâtir le consensus intellectuel destiné à dégager une réponse finale. De tels ancrages sont les topoi ou lieux communs : les topiques, si l’on préfère. Le topos est le non-problématique qui permet d’arriver à résoudre le problématique par une inférence qui les relie, tant en jouant sur la règle qui permet l’inférence que sur les contenus partagés, ou les deux. D’où une certaine ambiguïté à définir ce qu’il en est au juste des topoi ou lieux communs. La rhétorique, elle, ne se limite pas à la négation de thèses préalables comme le fait la dialectique, mais elle va au-delà, en produisant du discours vraisemblable, en s’appuyant elle aussi sur du non-problématique, sur des topiques, qui vont rendre acceptables ou convaincantes les multiples réponses proposées. Au fond, sans ces topiques, et cela malgré leur ambivalence, on ne pourrait pas passer du non-problématique, partagé au départ par les interlocuteurs, à du non-problématique, résolutoire, qui boucle le discours rhétorique.
Ambivalence ou richesse, les Topiques d’Aristote n’ont donc cessé d’interpeller ceux qui s’intéressent au rapport interpersonnel qui se joue dans l’inférence rhétorique. C’est ce que le volume que l’on va découvrir ici va nous permettre de reprendre à nouveaux frais.
Revue Internationale de Philosophie – Revue Internationale de Philosophie
74 pages – 16 × 24 cm
ISBN 978-2-930560-21-2 – décembre 2014