Les querelles médiévales qui opposèrent les défenseurs du pouvoir laïque à la Papauté ont été bien étudiées par les historiens de la pensée politique. Ces débats n’épuisent cependant pas la question du rapport entre laïcité et philosophie au Moyen Âge. À l’âge scolastique, l’importance sociale et politique de l’Église implique aussi un monopole culturel. Pour intégrer cette donnée à l’histoire de la philosophie, il vaut la peine d’examiner de plus près l’instruction des laïcs par les clercs et, inversement, l’appropriation de la philosophie par les laïcs : les politiques culturelles et les productions des clercs à destination des laïcs, ainsi que les attentes, les réceptions, les élaborations et les prétentions laïques à l’égard des savoirs philosophiques. Une telle enquête acquiert aussitôt une dimension réflexive. Elle questionne la spécificité de la philosophie comme discipline et comme contenu. En ses contenus, en ses fins et en ses formes, la philosophie varie en fonction de ses auteurs, de ses destinataires supposés et de ses lecteurs réels.
Ruedi Imbach et Catherine König-Pralong : Le défi laïque
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