Sans jamais se départir d’une liberté de ton à la fois incisive et drôle (trait que l’essayiste et le poète-traducteur partagent sans nul doute), cet échange épistolaire mêle anecdotes et réflexions métaphysiques, évocations d’accidents quotidiens et jugements sur l’histoire contemporaine, récits de potins littéraires et réflexions diverses sur la difficulté d’écrire, souvenirs et états d’âme, confessions et accès de rage.
D’abord témoignage d’une profonde amitié, il est pour le lecteur l’occasion de (re)découvrir un Cioran d’une extrême bienveillance, s’inquiétant, par exemple, de l’état de santé de son ami et lui prodiguant des conseils si précis, si éclairés qu’on les dirait inspirés du Vidal ou extraits de quelque ordonnance médicale !
Qu’on se rassure pourtant : le Cioran attentionné, plein d’affection qu’on sent au fil des lettres sait, ici encore, régaler son destinataire de formules sarcastiques, de pointes assassines qui sont autant de coups de gueules poussés contre l’homme et l’univers.
Guerne n’étant pas en reste sur le sujet et jouissant d’une plume tout aussi tranchante, on imagine aisément l’énergie qui se dégage de ce dialogue à la fois vif, chaleureux et imprégné de culture.