Écrire l’histoire de la philosophie ne consiste pas à restituer ce que les grands auteurs ont pensé successivement, mais à rendre intelligible des trajectoires inscrites dans leur temps. L’histoire de la philosophie n’est qu’un rameau de l’histoire intellectuelle, elle-même partie de l’histoire culturelle au sein de l’histoire sociale. Sans fusionner ces poupées russes – chaque strate jouissant d’une relative autonomie –, il est donc nécessaire de penser la philosophie dans son contexte intellectuel et socioculturel. C’est la première condition d’une histoire correctement informée.
Ensuite, comment savoir si l’histoire de la philosophie obéit à des lois, sinon en comparant les histoires des différentes civilisations dans lesquelles on peut repérer une telle pensée ? L’étude des réseaux intellectuels grecs, romains, arabo-musulmans, européens, russes, indiens, chinois et japonais, rend manifeste des récurrences : les cycles de la vie intellectuelle, quoique toujours singuliers, sont globalement analogues. Ces résultats jettent le doute sur la liberté de l’activité pensante en même temps qu’ils suscitent notre responsabilité de bien penser.
Cet ouvrage est ainsi la première histoire de la philosophie qui soit à la fois mondiale (étendue à huit civilisations), intellectuelle (intégrant l’histoire de la pensée religieuse, scientifique, morale et politique) et comparative (cherchant à dégager des récurrences et des lois).