Orazio Irrera et Salvo Vaccaro (dir.) : La pensée politique de Foucault

Loin d’être considérée comme une simple notion appartenant au vocabulaire de la théorie politique, l’idée foucaldienne de la politique renvoie plutôt à une attitude généalogique fournissant un diagnostic du présent et restituant des relations complexes et contingentes qui nouent des domaines de savoir, des types de normativité et des formes de subjectivité. Par ce biais cette idée touche tout un ensemble de questions qui ont été cruciales pour l’itinéraire intellectuel de Foucault. En premier lieu celles de la gouvernementalité et de la biopolitique, des savoirs et des pouvoirs qui les constituent, des pressions normalisantes avec leurs effets spécifiques d’assujettissement, mais aussi des résistances et des contre-conduites que la gouvernementalité et la biopolitique rencontrent et produisent dans leur exercice. Au cœur de l’idée foucaldienne de la politique on retrouve même la notion de conduite considérée dans sa duplicité constitutive : à la fois manière de conduire les hommes en structurant leur champ d’action éventuel, mais aussi manière de se conduire de la part des hommes conçus comme des sujets libres. Ce qui par ailleurs ne peut pas être disjoint de la question d’une histoire politique de la vérité, ce qui vise à problématiser les manières dont, de l’Antiquité gréco-romaine jusqu’au néolibéralisme de nos jours, les rapports de forces qui traversent les sociétés occidentales se sont historiquement imbriqués avec des régimes de vérité afin de gouverner la vie et l’existence des hommes. Ainsi le domaine de la politique croise également le projet d’une généalogie de l’obligation de dire-vrai sur soi-même, un foyer de réflexion où, dans les années 1980, Foucault a tenté de recadrer nombre de ses analyses, des expertises médico-légales à l’aveu, du souci de soi à la parrêsia. Quoi qu’il en soit, d’après Foucault la politique reste toujours marquée par une conflictualité qui donne lieu à des champs d’agonismes incessants, dans l’immanence desquels cette série souvent dispersée des points de non-acceptation du pouvoir peut aussi se composer politiquement par le biais de formes inédites d’existence qui excédent tout ordre discursif ou normatif et sont en mesure de remettre en question l’évidence et la nécessité du tout pouvoir.

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